Contribution de Christian Limagne

Christian LIMAGNE Architecte

Saint-Paul, le 02 Décembre 2011

Monsieur le Commissaire Enquêteur Enquête Publique pour la réalisation de la Nouvelle route du littoral

Hôtel de Ville de Ville de La Possession 97419 LA POSSESSION

Objet : Enquête Publique pour la réalisation de la Nouvelle route du littoral

  • Enquête préalable à la déclaration d’’Utilité Publique des travaux
  • Mise en compatibilité des PLU des communes de Saint-Denis et de La Possession

Monsieur le Commissaire Enquêteur,

Si la présente enquête a simplement pour objet de régulariser « un coup parti » des autorités Régionales par une mise en conformité de décisions déjà prises nous n’avons rien à dire sur les documents présentés qui de fait, « ajustent » les PLU des deux communes concernées 

au tracé de la nouvelle route sur l’espace littoral et sur l’océan, nous ne pouvons qu’approuver la cohérence de la démarche et constater qu’il n’y a pas d’anomalie à mettre en conformité les documents d’urbanisme.

Si, en revanche, vous-même et les Autorités que vous représentez s’interrogent avec sincérité et rigueur sur la pertinence de la déclaration d’Utilité Publique préalable aux travaux permettez moi de vous exprimer les plus grandes réserves sur le tracé retenu et les choix techniques induits.

Un débat avait été organisé en 2004 par la RÉGION sur l’ensemble de la problématique de la liaison entre Saint-Denis et l’ouest de l’île est un problème récurent de chaque mandat électif des autorités Régionales. Ces débats très riches et qui pouvaient laisser entrevoir de vraies solutions n’ont pas bénéficié des conclusions à la auteur de la très grande mobilisation qu’ils avaient suscités. Une grande partie de nos concitoyens se décourage de donner un avis qui n’est pas entendu ou qui sert de prétexte à confirmer de mauvaises décisions.

Le tracé malheureusement retenu pour la nouvelle route est mauvais. Le fait de passer au large oblige à des prouesses techniques extrêmement onéreuses dont le vrai coût ne sera connu qu’après les travaux. L’expérience montre que les dérives dans ce domaine peuvent très vite être vertigineuses. De plus notre monde est en train de changer et nous sommes avertis des risques gravissimes du surendettement qui engage les générations futures et menace la stabilité financière de notre pays et de notre Région.

Ce projet dont le coût exorbitant déjà estimé à plus d’un milliard et demi d’Euros ne garantit pas une liaison pérenne entre Saint-Denis et La Possession et ne garantit pas non plus la sécurité des automobilistes.

Pour éloigner la route de la falaise les ingénieurs de la Région ont préféré affronter le risque venu de la mer dont ils ignorent presque tout et dont nous n’avons pas collectivement l’expérience. Il s’agit, encore une fois, de satisfaire à une idéologie dépassée (dominante au siècle dernier) que l’homme est capable à grand renfort de prouesses techniques de dominer la nature dont il maîtriserait tous les paramètres. Le réchauffement climatique et les catastrophes naturelles qui se multiplient de part le monde de manière croissante sont sans doute en grande partie dus à cette fameuse croyance que l’homme est capable de tout avec de l’argent et des techniques de plus en plus performantes. Or beaucoup d’entre nous constatent que c’est l’inverse qui se produit : les techniques modernes ne nous mettent pas toujours à l’abri des risques majeurs et parfois les provoquent.

De plus, nous sommes entrain de découvrir l’impact très grave du surendettement collectif et des conséquences dangereuses pour l’équilibre de nos sociétés, la paix et la justice sociale. Il n’est pas normal de vivre « au dessus de nos moyen s» et d’endetter nos enfants pour plusieurs générations. Surtout pour un ouvrage dangereux et inutile dans sa forme actuelle.

La Région envisage un ouvrage technique exceptionnel et très coûteux qui risque de ne pas répondre correctement aux objectifs annoncés d’une liaison sécurisée entre Saint-Denis et La Possession. Face aux risques de désordre grave sur l’ouvrage en viaduc de 5 kilomètres construit sur l’Océan, nos techniciens auront sans doute tout prévu. Malheureusement, comme souvent, le problème viendra de ce qu’ils ne connaissent pas et qu’ils n’auront pas prévu parce que la logique qui a présidé aux décisions n’est pas complète.

A titre dexemple, lorsque le pont de la Rivière Saint-Etienne a été construit, tout le savoir faire de nos ingénieurs a été mobilisé pour que l’investissement soit durable. Et pourtant, malgré toutes les marges de sécurité et les précautions déjà prises à l’époque le nouveau pont de la Rivière Saint-Etienne s’est effondré (sur toute sa longueur).

Qu’en sera-t-il des risques venus de la mer, de la houle cyclonique, des tsunamis, de la corrosion, du vieillissement prématuré des ouvrages, pour ce qui concerne l’ouvrage lui même. Quelle sera l’alternative si par inadvertance ce viaduc devenait impraticable.

Et pour la sécurité des automobilistes, quel sera le moyen de sortie en cas d’accident grave bloquant tout le trafic, comment pourrons nous quitter ce viaduc à pied ou acheminer des secours ? Y a-t-il des zones de refuge, comme dans les tunnels ? Faudra-t-il attendre l’hélicoptère pour rentrer à la maison ?

De plus, on nous annonce que nous pourrons circuler de manière fluide sans avoir besoin de nous attarder sur cette route d’exception.

Il y aura au moins autant d’embouteillages qu’actuellement parce que les villes de Saint- Denis et de la Possession ne sont pas aptes à recevoir un trafic routier en augmentation permanente.

Imaginons que la nouvelle Route soit demain ouverte au trafic automobile croissant à venir. Continuera-t-on à attendre, dans la tranchée couverte que le feu du boulevard Doret se mette au vert ? Continuera t’on à attendre au rondpoint de la Trinité, à l’entrée de Sainte-Clotilde , au carrefour de la Région, et ainsi de suite.

Faudra-t’il, par ailleurs, détruire davantage le littoral des villes de la Possession et de Saint-Denis pour faire passer toujours davantage des voitures ?

Tant que le boulevard Sud ne sera pas devenu une véritable route à 4 voies sans feu rouge, aucun projet sur la route du littoral ne sera crédible et justifiable sauf si les autorités Régionales veulent construire sur la mer un grand parc de stationnement (ou l’on attendra son tour pour avancer) pour plus de 1,5 milliards d’Euros !

Ne peut-on utiliser mieux les moyens financiers mis en place, voire faire des économies en assurant de meilleurs résultats ?

Si les bouchons disparaissent à l’entrée de Saint Denis en mobilisant toute la largeur disponible du pont Vinh-San (ce qui n’est pas le cas actuellement) et grâce à un boulevard sud amélioré permettant de circuler sans obstacle jusqu’à l’aéroport, il n’y aura plus d’attente à l’entrée de Saint-Denis ce qui améliorera la sécurité de la route actuelle. Le danger actuel vient en grande partie du nombre de véhicules qui attend sous la falaise du cap Bernard et parfois jusqu’à la

Grande Chaloupe. Il n’y a donc pas besoin de construire une nouvelle route sur la mer pour cela.

Il nous semble inutile d’engager des moyens financiers colossaux pour remplacer une route du littoral qui existe déjà (avec ses limites), tant que le Boulevard Sud qui devait à l’origine permettre de contourner la ville de Saint-Denis sans difficulté n’aura pas été calibré pour devenir une véritable route de contournement du chef lieu.

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